Le cauchemar : Son vrai rôle, ses bienfaits et comment s’en débarrasser ?

On a tous fait un jour l’expérience d’un rêve angoissant ou oppressant. Le mauvais rêve, ou cauchemar a longtemps été perçu négativement par l’ensemble de la population. À travers cette série d’articles très courts, je vous propose de découvrir son vrai rôle et ses bienfaits, qui en profite ?, mais aussi comment s’aider soi-même et s’en débarrasser, quand il devient un poids pour le dormeur.

 

Cette série d’articles est en grande partie un résumé des informations recueillies par le magazine Science & Vie de juillet 2014, se basant sur les nombreux travaux de Tore Nielsen, Antonio Zadra et Joseph De Koninck.

Le cauchemar : Son vrai rôle et ses bienfaits

 

La mécanique du cauchemar en 5 étapes :

  1. Un scénario cauchemardesque se forme à partir de peurs vécues.
  2. Ce scénario déclenche une réaction de peur.
  3. Cette peur est analysée.
  4. La peur est inhibée et transformée en souvenir acceptable,
  5. Mais si la peur est trop forte, le dormeur se réveille.

 

Cette “mécanique” est issue du premier modèle de référence élaboré par Tore Nielsen, psychologue à l’hôpital du Sacré-Cœur de Montréal

Les cauchemars créent un scénario fictif qui mélange les éléments anxiogènes stockés dans notre mémoire de peur à d’autres, plus rassurants, puisés dans nos autres souvenirs.

 

En détail

 

Ce travail de simulation serait initié par un organe dont le rôle central dans la mémoire est bien connu : l’hippocampe, une structure cérébrale nichée au cœur du cerveau.

C’est en son sein que se créerait le scénario fictif, à la fois criant de réalisme et incohérent. Scénario effrayant, certes, mais échappant au radar de la logique. Pendant le sommeil, le cortex préfrontal (région du cerveau qui analyse et détecte les invraisemblances) est désactivé. Mais pas l’amygdale, où loge notre mémoire de peur. Du coup, celle-ci se trouve bernée : croyant revivre un souvenir dangereux, elle déclenche chez le dormeur les émotions de peur typiques des cauchemars.

Sauf que les éléments étrangers, voir totalement loufoques introduits dans le scénario par l’hippocampe, rendent l’expérience moins angoissante que le souvenir originel : les souvenirs de peur initialement stockés dans l’amygdale s’émoussent et se transforment en mémoires de peur atténuées, lesquelles siègent alors dans une autre zone : le cortex préfrontal médian.

Quelquefois l’amygdale étant surchargée d’émotions angoissantes trop fortes, l’hippocampe n’arrive pas à raisonner; c’est notamment ce mécanisme qui a été identifié par Francine Shapiro en 1987, dans l’utilisation de l’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing – Désensibilisation d’un évènement traumatique par mouvement oculaire).

Dans certains cas, la peur est si importante qu’elle devient ingérable naturellement, elle s’auto alimente avec le cauchemar et se trouve renforcée. Le réveil en plein cauchemar est alors le signe de l’échec de notre cerveau dans sa tentative de neutralisation.

 

En presque un mot

 

En cauchemardant, le cerveau transforme nos grandes terreurs diurnes en petites frayeurs nocturnes. Un jeu tout sauf anodin, car “le réalisme de la simulation permet au cerveau de travailler comme s’il était réveillé, et d’effectuer des processus aussi efficaces qu’à l’éveil pour dominer sa peur”, explique Tore Nielsen.

 

Enfin

 

Les cauchemars servent donc à duper notre cerveau émotionnel, en réécrivant les souvenirs de nos peurs les plus perturbantes pour les neutraliser : C’est donc le moyen qu’à trouver notre cerveau pour se débarrasser de nos peurs.

Et ça marche ! Au fil des nuits, les véritables peurs de l’individu s’atténuent, celui-ci parvenant à les maitriser pendant son sommeil.

Ce qui explique alors en partie l’efficacité de l’autohypnose ou de l’hypnose en thérapie et des progrès que permet également la pratique du rêve lucide sur les différents apprentissages de nouvelles expériences.

Le cauchemar 2/3 : Qui en profite ?

Environ 98% des adultes déclarent en avoir déjà fait et 85% au cours de l’année écoulée. Un individu ordinaire fait au moins un cauchemar par mois. Et vous, de combien de rêves ou cauchemars êtes-vous capable de vous souvenir ?

Le manque de sommeil augmente lui aussi l’apparition de cauchemars.

C’est autour de 3 ans que les enfants font le plus de cauchemars. Plus on vieillit, moins on en fait.

 

Pour le chercheur Antonio Zadra, également psychologue à l’hôpital du Sacré-Cœur de Montréal:

“les personnes qui font beaucoup de cauchemars ont, en général, un tempérament plus anxieux, plus déprimé. Elles réagissent plus fortement aux stress quotidiens auxquels elles doivent faire face.”

 

Panorama des cauchemars

 

Antonio Zadra, a pu établir un panorama des thèmes qui hantent nos cauchemars, à travers une étude sur plusieurs centaines de personnes.

 

  • 49% Agression physique
  • 21% Conflit personnel
  • 16% Echec, impuissance
  • 11% Poursuite
  • 11% Force maléfique
  • 9% Maladie, mort
  • 9% Accident
  • 9% angoisse
  • 7% Insectes
  • 5% Catastrophes

 

Les hommes et les femmes ne rêvent pas forcément des mêmes choses.

Alors que,

Monsieur se bat, souvent seul, contre des éléments déchainés (séisme, inondation…) ou dans des scènes de guerre.

Madame se dispute avec sa famille ou ses collègues, se fait humilier ou tromper par son mari.

 

1/5 soit 20% – C’est le nombre de cauchemars qui se terminent bien.

“À la fin le rêveur est sauvé ou parvient à prendre le contrôle de la situation”

Chiffre qui permet de mettre en lumière le fait qu’il n’y a pas que l’échec de la régulation émotionnelle que tente de créer le cauchemar qui réveille le dormeur, mais aussi l’intensité émotionnelle.

 

En fonction des récits et des réveils, on a pu se rendre compte que le seuil de tolérance émotionnelle est différent pour chacun. Là où un individu va se réveiller au moment où il est poursuivi par un agresseur, un autre ne se réveillera qu’après avoir vécu l’agression entière et verra son corps tomber.

En étudiant les contenus des cauchemars, Antonio Zadra a pu s’apercevoir que la majorité des cauchemars débutent comme des rêves anodins, et que les déclencheurs sont souvent évidents, de par le revirement de situation qui se produit. Les avez-vous repérés chez vous ?

 
 

À noter :

1 enfant de moins de 3 ans qui s’endort systématiquement avec un parent à ses côtés, sera 3 ans plus tard sujet à davantage de réveils nocturnes et de cauchemars que les enfants habitués à s’endormir seuls.

En revanche, réconforter son enfant lorsqu’il se réveille la nuit, en le prenant avec soi dans le lit parental, diminuerait ensuite la fréquence des mauvais rêves.
 

Le cauchemar 3/3 : S’en débarrasser !

Comme évoqué jusqu’ici, au-delà de la fonction de régulation qu’arbore le cauchemar, quand il devient un poids et qu’il a un impact sur le dormeur, alors il devient problématique.

Un cercle vicieux

Le trouble principal associé au cauchemar est l’insomnie. Elle se met en place selon un cercle vicieux dont le point de départ est une série de cauchemars récurrents : effrayé, le mauvais rêveur n’ose plus se rendormir. Les heures passent, sans sommeil, qui augmentent au matin l’anxiété. Et avec elle, les risques de faire de nouveaux cauchemars la nuit suivante. Aller se coucher devient alors une épreuve redoutée.

Quand les cauchemars engendrent peur de s’endormir et insomnies, il faut les soigner.

Des solutions :

IRT ?

Au Canada, une thérapie a vu le jour, L’IRT (Imagery Rehearsal Therapy, ou thérapie par répétition de l’imagerie mentale). Son principe rappelle le mécanisme de formation des mauvais rêves modélisé par Tore Nielsen. Dans les grandes lignes, l’IRT consiste en effet à faire accomplir au cerveau, pendant le jour, le travail que le cauchemar “utile”, celui qui permet d’apprivoiser nos peurs, n’a pas réussi à finaliser pendant la nuit. Ainsi, le patient, détendu, raconte son cauchemar au thérapeute, qui lui demande de changer un élément du récit pour le rendre moins angoissant; puis d’en modifier un autre détail, et encore un autre, jusqu’à ce qu’à force de répétition et de légères modifications, une version “altérée” du cauchemar s’imprime dans le cerveau.

Ce procédé met en évidence un fait simple : raconter, écrire ou dessiner son cauchemar est le premier pas pour s’en débarrasser.

Interprétation des cauchemars

L’interprétation des cauchemars est aussi une manière simple de se défaire de ses peurs. En effet, sans avoir la prétention de détenir la réalité qui se cache derrière un symbole ou un autre, elle permet au rêveur de faire de la répétition mentale, base de la technique IRT, sans en en avoir l’air.

Rêve lucide

Le rêve lucide exploré dans les années 70 connait un renouveau inattendu pour certains. Être conscient que l’on rêve… en plein rêve ? La technique consiste à prendre le contrôle de son rêve au moment même où celui-ci a lieu.

“Entre 2 et 5% de la population le font spontanément, mais on peut apprendre à le faire” explique Joseph De Koninck, Spécialiste des rêves à l’Université d’Ottawa (Canada).

Modifier la totalité d’un rêve en changeant le lieu, les personnages par exemple, demande une maîtrise du rêve lucide certaine. En revanche, être capable d’en modifier certains paramètres, revivre la scène en la modifiant à chaque fois un peu plus, est beaucoup plus accessible.